8/17/2012

Des invitations logiques

Le débat des chefs, si on exclut les face-à-face de TVA qui a décidé de faire bande à part, aura lieu dimanche. Jusqu'à maintenant, ils seront quatre à discuter, je l'espère, de leur vision du Québec. J'aime mieux qu'ils jasent de l'avenir du Québec au lieu de s'attaquer sur des anecdotes (le poids de Barrette, entre autres), même si je pense bien que ça va arriver. "Non mais, M. Charest, allez-vous condamner les propos désobligeants de Jean Tremblay à l'endroit de ma candidate Taj Mahal Benson & Hedges Djemila Benhabib?", pourrait demander Marois...

Assez. Oublions cet épisode certes malheureux et attardons nous aux choses sérieuses. Parlant de chose sérieuse, je n'arrive encore pas à comprendre pour quelle raison on a décidé de mettre de côté Jean-Martin Aussant, d'Option Nationale.

Je sais, c'est une question de politique éditoriale des diffuseurs. L'idée de l'inviter a été débattue à l'interne, selon ce qu'on peut comprendre dans ce pertinent texte du magazine du Conseil de presse du Québec. "Nous sommes très conscients de notre responsabilité. Cela dit, le débat des chefs, c’est une émission d’affaires publiques dont l’objectif est d’informer les téléspectateurs. Il faut aussi garder à l’esprit que le débat des chefs est un des éléments de notre couverture de la campagne électorale et que, dans l’ensemble de notre couverture des 35 jours de campagne, tous les partis reçoivent notre attention", plaide Michel Cormier, directeur de l'info à Radio-Can.

Mais justement, si ce sont les objectifs des diffuseurs, il me semble que d'inviter ON au débat va de soi. Mais le meilleur est la suite, la critique que fait Marc-François Bernier, loin d'être un deux de pique dans le monde de l'éhtique des médias. "Ce genre de décision me semble davantage motivée par la performance des cotes d’écoute que par la volonté d’informer tous les publics." Voilà, c'est dit.

Un chef de parti ne peut pas imposer sa présence, affirment les diffuseurs, dans cet article du Devoir. Mais n'empêche que c'est injuste et tout à fait arbitraire. À ce que je sache, rien n'empêche ces chers diffuseurs de changer d'avis. Sur Facebook, Radio-Canada a demandé mardi si ON devrait être présent pendant les débats des chefs. La question a suscité plus de 1 600 commentaires, en très grande majorité sinon tous favorables à la venue de M. Aussant sur les plateaux de télé.

Petite parenthèse ici : quelques jours à peine après le début de la campagne, le magazine L'Actualité a décidé de créer la Maison des candidats. Au départ, quand la patente a été lancée, il n'y avait pas de blogue pour ON. La publication s'est rapidement expliquée en commentaire : "Deux raisons ont motivé notre choix d’offrir des blogues à quatre candidats. Tout d’abord, il va de soi qu’une telle opération demande déjà beaucoup de ressources techniques et humaines. Nous ne pouvions offrir des blogues aux 20 partis autorisés et devions procéder à une sélection. Ensuite, l’objectif de notre «maison des candidats» est de permettre aux internautes d’avoir accès aux coulisses de la campagne, mais surtout d’en apprendre davantage sur les positions des partis qui risquent de former le prochain gouvernement. Nous avons donc fait notre sélection sur la base des intentions de vote des électeurs et avons retenu les partis qui démarraient la campagne avec plus de 5% des appuis. Évidemment, si un cinquième parti gagnait suffisamment de terrain pour se hisser plus haut dans les intentions de vote, nous pourrions envisager lui créer un blogue."

Plusieurs internautes ont critiqué la décision du magazine, dont moi. J'acceptais difficilement l'argument sur les ressources. "De plus, on sait pas mal tous que QS ne risque pas de former le prochain gouvernement. Alors votre deuxième argument, je ne le comprends pas. Surtout que, à moins que je me trompe, les contenus seront rédigés par les candidats... La diversité des voix, j'y crois beaucoup", ai-je ajouté. Quelques jours plus tard, je voyais que la charmante Catherine Dorion avait son blogue. Pourtant, selon les derniers sondages, ON obtient 3 % seulement. Les gens de L'Actualité ont réalisé qu'ils n'ont pas bien évalué leur approche et ont ajouté un blogue pour ON. Bravo!

Donc, chers diffuseurs, je pense que c'est assez clair, vous trouvez pas? La pression populaire devrait vous faire changer d'avis. Bien des gens, et spécifiquement des jeunes, veulent les représentants de QS et ON. Vous avez vraiment avantage à faire venir Aussant et Khadir ou David sur vos plateaux, comme les autres candidats, même si Legault, rappelons-le, n'est même pas élu... Un peu de respect pour la démocratie. Cette démocratie que les journalistes, bien souvent, se targuent de défendre en se qualifiant de chiens de garde. 

Eh bien au tour des citoyens de grogner et de réclamer des décisions plus justes et équitables de votre part.

Aux dernières nouvelles, Aussant avait demandé une injonction et était en attente de la décision de Jean-François Émond, de la Cour supérieure. J'espère ardemment que, comme n'importe quelle fille qui se ferait demander en mariage par Ryan Gosling, il dira oui.

Pour signer une pétition réclamant la présence non seulement de JM Aussant mais aussi d'Amir Khadir, cochef de Québec solidaire, aux débats qui s'en viennent, c'est ici. À noter que Françoise David, l'autre cochef de QS, participe au débat de dimanche.

Je termine en glissant un mot à propos d'une discussion que j'ai eue avec Émilie Guimond-Bélanger, candidate de Québec solidaire dans Jean-Talon, après un débat de candidats à Québec. Elle a dit que souvent, elle recevait des appels de journalistes qui lui demandaient ses commentaires sur tel événement qui faisait l'actualité. Après leur avoir répondu qu'elle voulait davantage parler de questions de fond et du contenu de la plateforme de son parti, elle se faisait dire par les journalistes que, malheureusement, ils n'allaient pas prendre ce qu'elle leur offrait comme propos.

Puis après, on vient déplorer que les couteaux volent bas et que les manchettes traitent de sujets superficiels. Et qu'en plus QS et ON n'ont pas de visibilité. Je crois, surtout ici, que c'est en partie à cause des médias qui s'attardent trop à des pacotilles. Ils ont une responsabilité énorme mais réalisent rarement leur véritable mission d'informer le public.

"Nous avons l’impression que seuls les coups d’éclat peuvent être couverts", affirme d'ailleurs JM Aussant dans cette entrevue, qualifiant la couverture médiatique de son parti de "difficile".

Disons le franchement : les médias doivent se regarder le nombril un peu et se demander : "bon, c'est quoi notre objectif?". S'ils prétendent alimenter le débat et permettre aux citoyens/électeurs de se faire une tête à propos de la prochaine élection en abordant les véritables enjeux, moi je réponds : iissh, pas sûr.

Enfin, j'ai même vu des annonces de manifs devant Radio-Can. C'est dire à quel point les gens veulent des débats diversifiés et qui font entendre ceux et celle qui le méritent.

MAJ vendredi midi : Finalement, Aussant ne pourra participer aux débats des chefs, a tranché la Cour Supérieure, vendredi. Il est très déçu. Moi aussi.

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