4/03/2008

Bon sens

Hier, alors que je m'apprêtais à mordre dans un morceau de lasagne dodu provenant de la cafétéria, j'ai aperçu une dame avec son chien-guide. Un labrador blond. Je me suis dit que le chien était beau. Mais aussi, j'ai réfléchi : ne plus voir, merde. Ça doit être chien (pas le labrador, là...) en crime bine de ne pas pouvoir voir.

Encore aujourd'hui, au coin de la rue, la non voyance était à l'honneur. Sur le trottoir, un monsieur, lunettes fumées sur le nez, canne dans la main, attendait que la lumière change. Le petit bonhomme qui marche blanc est apparu, un petit son strident s'est fait entendre, lui signalant qu'il pouvait traverser, ce qu'il a fait en prenant bien son temps.

Mais bon Dieu, être pris à faire ça toute ma vie, ça me rendrait fou. En sortant de l'épicerie, l'autre jour, il y avait une table où l'on vendait des articles de la fondation Mira. Dans un élan de générosité, j'ai acheté un porte-clés, l'objet qui, à mes yeux, était le plus intéressant. Mais ce qui était plus intéressant que la patente qui se trouve dans ma proche droite présentement, c'était la facilité avec laquelle la personne m'a répondu. Cette personne était aveugle. Elle m'a dit le prix, m'a indiqué où le truc en métal se trouvait parmi les articles.

Elle se comportait pratiquement comme si elle me voyait. Sans vision, sans aucune référence visuelle. Rien. Quand même impressionnant.

Si jamais je devais perdre un de mes sens, et que je pouvais choisir lequel, je me demande bien lequel j'aimerais mieux que ce soit. Certainement pas la vue. L'ouïe, peut-être. Mais sans ouïe, pas de musique, pas d'écoute. Beaucoup moins d'émotions. Hmmm. Non, pas l'ouïe.

Alors il en reste trois : le toucher, le goût et l'odorat. Ça doit être bizarre de ne plus être capable de toucher... Le goût, je voudrais le garder. Des saveurs, ça se savoure. En y pensant un peu, mon nez, je n'y tiens pas plus que ça.

Ça ne me dérangerait pas vraiment d'entrer dans une bonbonnière sans sentir la gomme balloune. Mais l'odeur d'essence... Ah merde, non. Ça par contre, ce serait plate. Car, sans blagues, mes narines jouissent à chaque fois que j'arrête au Ultramar. Ça fait partie de mes plus grands bonheurs hebdomadaires. Je m'ennuie d'ailleurs plus que tout de cette poffe de gaz dans notre cabanon où il y avait, jadis, notre vieux tracteur à gazon. Je pouvais y passer des secondes et des secondes. Jusqu'à des minutes de buzz, mes amis.

Mon choix fait, je peux donc aller me doucher... pour sentir le bon savon. Et, après, dormir en paix avec mes sens.

1 commentaire:

Anonyme a dit...

L'odorat est le sens le plus intimement lié aux souvenirs...
-Valérie